lundi 15 décembre 2008

Globalia


Dans le cadre de notre fanzine sur la science-fiction, j'ai décidé de faire une tentative de critique littéraire d'un roman qui m'a tenu à coeur et dont le titre est Globalia. Ce roman écrit par Jean-Christophe Ruffin et paru en 2004 se situe dans la grande lignée des romans d'anticipation qui ont irrigué toute la littétature du XXème siècle avec des noms devenus illustres tels que 1984 de Georges Orwell et Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley

D'après l'auteur, Jean-Christphe Ruffin, Globalia se veut une réactualisation de 1984 par rapport à la globalisation actuelle. Cette démarche a sa légitimité car, bien que Georges Orwell avait cerné des traits patents de la moderniré tels que le contrôle de l'information, la vidéosurveillance, 1984 nous donne aujourd'hui l'impression de dater un peu et de décrire un système plus proche de l'URSS que de notre époque contemporaine. Cette démarche est d'autant plus salutaire que Globalia est une véritable réussite, à tel point que l'on se demande en lisant si l'on à affaire à une société inventée ou bien à la nôtre pour bientôt.

Globalia a tous les atouts d'une utopie idéle: sans arme, végétarienne et très écologiste. Les globaliens vivent dans une sorte de bulle géante, constamment acclimaté par des technologiques qui donnent un beau temps permanent. Cette société semble ne pas avoit de frontière en ce sens que toutes les bulles présentes se ressemblent les unes aux autres. Les globaliens vivent tous apparemment dans la prospérité et contrairement à beaucoup de romans d'anticipation, la liberté d'expression y est totale; Les journalistes sont là pour faire leur travail, il y a tous les services de police et de santé nécéssaire à une société équilibré; Enfin, les moeurs y sont plutôt libre, l'hédonisme constituant une valeur prépondérante. Le mariage est devenue une valeur rare et les divorces se sont aussi librement qu'à Las Vegas. Il est même possible de faire du trekking dans les zones les plus arides pour se donner des sensations fortes pour ceux qui considéreraient Globalia comme trop asceptisé.


Seulement voilà, notre personnage principal, Baikal, ne se sent pas à son aise sans pour autant savoir pourquoi... Sa petite amie d'ailleurs ne le comprend pas car tout est possible à Globalia et qui voudrait d'une autre société comme celle-là. Mais Baikal a des ambitions qui touchent l'un des rares tabous de la société Globalienne: il veut étudier l'histoire! Car n'est-ce pas suspect que de vouloir étudier des société qui ne peuvent être que barbares par rapport à la sienne??? Les musées globaliens sont d'ailleurs là pour montrer à quel point nos sociétés furent minés par l'insécurité, le port d'armes sans discernement, la paupérisation ect... Il faut dire d'ailleurs que cette société n'est pas toujours rose: elle est gangrenné par toutes sortes d'attentats terroristes venant de l'extérieur minant le quotidien tranquille des habitants... Tout événement d'ailleurs est instantanément retranscrit sur les écrans plasma qui constitue une source importante d'information, les livres et les traces écrites ayant disparus par esprit de facilité.

L'un des autres points les plus sensibles de Globalia, c'est son rapport avec les jeunes: en effet, cette utopie se révèle n'être fait essentiellement pour des vieux mais qui aspirent à rester éternellement jeune. Puisque la liberté et la jouissance prévaut à Globalia, il y a peu de famille nombreuse et les personnes se ont une espérance de vie pouvant dépasser les 120 ans et toute la chirurgie esthétique la plus high-tech est à leur portée. Les jeunes vivent donc moins facilement que les personnes âgées et la jeunesse n'est pas considéré comme une valeure sûre dans l'imaginaire collectif...


Baikal se retrouve de l'autre côté du miroir et découvre la vérité avec un mélange de surprise et d'effroi. Ce que l'on appelle finalement des terroristes ne sont rien d'autre que des nomades refusant cette société si belle. Ce qu'il voit, ce n'est ni plus ni moins que les vestiges de l'ancienne société que Globalia rejette. Mais pire encore, Baikal découvre les vraies méthodes de sa citée et qui s'apparentent à la technique de la carotte et du baton: Globalia bombarde ces populations discidentes avec leur vaisseaux puis viennent quelques minutes plus tard les ravitailler en nourriture, une skyzophrénie rappelant étrangement l'attitude de l'armée américaine en Afghanistant, oscillant entre violation continue des droits de l'homme et ravitaillement. Globalia dévoile ainsi les rouages intimes de son fonctionnement: elle a besoin d'un ennemi pour exister.

Jean-Christophe Ruffin raconte l'histoire d'une société futuriste qui pourrait bien être la nôtre. Mais la dimension provocatrice du roman réside peut-être dans ce qui le singularise de la plupart des romans d'anticipation. En effet, ceux-ci dressent souvent un portrait de la société ou sont poussés jusqu'à leur extrême des valeurs classées plutôt à droite: la puissance de bras armée, la vidéosurveillance, l'emprise du pouvoir sur les mass-médias. Alors que la puissance de Globalia réside dans le fait de placer la population dans une sorte de contentement béat en ayant poussé jusqu'à son extrême un certain nombre valeurs classées plutôt à gauche: écologie, liberté individuelle, liberté dans la famille ect... En somme, Globalia serait une sorte de paradis oligarchique dirigé par et pour les bobos!

Toutes les dimensions d'un bon roman sont bien dosés: une histoire haletante, un cadre pertinemment bien défini, des personnages intéressants et une belle histoire d'amour au milieu de tout ça. Le roman permet d'ouvrir, à mes yeux, d'ouvrir un des pistes de réflexion sur des sujets très différents tels que l'apport contradictoire de mai 68, qui a décloisonné un certain nombre des rigidités mais qui a en partie été également une génération qui a dévoré ses propres enfants, sur l'impérieux besoin des sociétés post-modernes à se doper économiquement par un abondant arsennal militaro-industriel à vendre sur la planète, et enfin sur le développement effrenné des "gated community" (guettos pour riches) à travers les capitales du monde (Villa Montmorency, Manhattan Village, la Zona de Mexico ect...) depuis le XIXème siècle et plus particulièrement depuis les années 70...

Pour finir, Globalia sonne étrangement avec les réflexions de Miclael Gamma, anthropologue et auteur de "rencontres au sommet" qui a enquêté pendant plusieurs années sur le fonctionnement interne d'institutions jugées opaques tels que le groupe Builderberg ou la trilatérale (qui font les choux gras des théories conspirationistes sur Internet...). Ses investigations lui ont finalement montré que l'essence de ces institutions de pouvoir est l'intégration de la dissidence comme mode de domination: les élites qui se fréquentent à Builderberg et à la Trilatérale seraient ravis d'inviter José Bové à leur réunion car les modes de domination du monde contemporain ne peuvent perdurer que par l"assimilation de ce qui lui est étranger. Et c'est cette assimilation qui permet l'une des formes les plus subtiles de contrôle: la fabrique du consentement.